par Tanguy Cathelain
•
23 sept., 2024
Nous avons tous des échecs dans la vie : des échecs mineurs et de gros échecs. Nous pouvons rater une vente, ne pas être recruté à l’issue d’un processus de chasse, ne pas atteindre des objectifs validés, ne pas réussir à attirer des investisseurs sur un projet majeur, déposer le bilan ou être licencié. Suivant l’importance des enjeux et le niveau d’investissement personnel, l’échec peut être plus ou moins bien vécu. Il peut avoir des conséquences négatives sur la personne même (perte de confiance en soi, démotivation, remise en cause de ses buts et de ses réalisations …), sur sa vie de famille ou sur son niveau de vie. Un échec bien vécu ne pénalise pas l'activité personnelle et professionnelle. Un échec bien managé peut être le moteur de futurs succès. On entend souvent dire à propos de l’échec qu’il est formateur et qu’il permet d’avancer. On applique à sa gestion la théorie du Dr Elisabeth Kübler-Ross sur l’appropriation par l’individu de la perspective de sa mort prochaine et inéluctable. Cela est d’ailleurs pertinent : tout individu, en phase d’échec, va effectivement traverser les cinq phases de ce parcours : déni, colère, marchandage, dépression et enfin acceptation. Le parcours est plus ou moins long et intense suivant l’importance ressentie de l’échec, sa récurrence peut-être et les qualités psychologiques de l’individu. Ce parcours douloureux est-il évitable ? Oui, répondent les stoïciens. L'entraînement stoïcien, comme celui d'un un athlète sportif, se traduit par un vécu et une gestion de l'échec plus aisée et il favorise le rebond. I. COMMENT LE STOÏCIEN EXPÉRIMENTÉ SE COMPORTE FACE A L’ÉCHEC Le stoïcien expérimenté est un homme ou une femme qui maîtrise ses passions et qui privilégie la raison. Le stoïcien fait la part entre ce qui dépend de lui et ce qui ne dépend pas de lui. Suivant cette approche, il distingue l’évènement de la manière dont il va le vivre. S’il connaît un échec, comme rater une vente stratégique, il va considérer que c’est un fait, que c’est arrivé et qu’on n’y peut plus rien. Il sait, par expérience, qu’il lui appartient de vivre cet échec comme une catastrophe et de sombrer dans la dépression ou de le relativiser et de rebondir en tirant les enseignements de ce qui s’est passé. La puissance de l’entraînement à certains principes permet au stoïcien de garder la tête froide face à l’adversité. Nous avons mentionné le premier d’entre eux : faire la part entre ce qui dépend de nous et ce qui ne dépend pas de nous. - Ce principe permet d'abord, face à l’échec, de mettre à leur place respective la responsabilité personnelle et les éléments de contexte que l’on ne peut pas maîtriser, même lorsqu’on a fait le job à 200% : des critères cachés, des arguments nouveaux d’un concurrent, le poids réel des acteurs internes du prospect dans la chaîne de décision, le fait d'être grippé le jour de la négociation … Ce principe nous rappelle que nous devons toujours nous comporter avec humilité : malgré tous nos efforts, nous devons savoir que nous ne contrôlons pas tout . - Ce principe invite également à distinguer les faits des représentations que nous en faisons lorsque nous développons des émotions et des sentiments à partir de ces faits. Un échec se traduit par un fait qui est extérieur. Pour le stoïcien expérimenté, il n’y a donc pas lieu de développer des émotions telles que des regrets, du ressentiment, un sentiment d’être nul, de la colère ... pour quelque chose qui est extérieur et qu’on ne peut plus changer. Pour que l’échec ne soit pas générateur de déception, voire pire, le stoïcien mobilise un autre principe : la relation du stoïcien avec le temps . Deux idées fortes le caractérisent : • le temps est notre bien le plus précieux, • le futur est toujours incertain, le passé est connu et le présent est fugace, mais c’est ce que nous vivons. Comment cela aide-t-il le stoïcien face à l’échec ? En premier lieu, comme l’avenir est incertain, le stoïcien ne fait pas de plans sur la comète. Il met toute son énergie et son intelligence pour réussir, mais il ne s’illusionne pas pour autant. Dans tout projet, l’échec est un évènement qui a une probabilité non nulle d’arriver. S’il arrive, cela ne peut donc pas être un traumatisme. Ensuite, dans le cadre d’une analyse logique de la situation, le stoïcien est conscient, le temps étant son bien le plus précieux, qu’il doit continuer et passer à autre chose plutôt que de se lamenter et de ressasser le passé. En résumé, face l’échec, le stoïcien - le regarde en face, sans passion, - fait la part des choses entre sa responsabilité et ce qui est hors de son contrôle, - en tire les enseignements et passe à la suite. II. COMMENT LE NON-STOÏCIEN PEUT AMÉLIORER SON MANAGEMENT DE L’ÉCHEC Ce que nous venons de décrire concerne le stoïcien expérimenté. Il est comme un athlète de haut niveau, performant parce que soumis à un entraînement de long terme, intense et régulier. Sans vouloir concourir avec l’athlète de haut niveau, le non-stoïcien peut tirer parti très utilement et concrètement de l’expérience et de la pratique de celui-ci. C’est la particularité du stoïcisme : c’est une philosophie du quotidien. Ses visées sont opérationnelles. Le non-stoïcien travaille avec profit sur les trois cas d’application suivants : - Accélérer son parcours d’acceptation d’un échec récent, - Anticiper le possible échec d’un projet ou d’une action en cours, - Développer un regard nouveau sur son travail et sur les projets qu’il conduit en les plaçant dans une perspective plus raisonnée. Le non-stoïcien, accompagné par un coach, entre progressivement dans le schéma mental du stoïcien par le questionnement socratique sur des cas concrets : des exemples, des situations vécues ou en cours. Le questionnement est guidé par trois principes clés du stoïcisme : - La distinction entre ce que l’on contrôle et ce que l’on ne contrôle pas, - La distinction des faits de celle des représentations, donc la maîtrise des émotions et des passions, - La relation avec le temps. Le coach apporte un appui déterminant pour la réussite de ce travail. Il est un soutien méthodologique et moral et il est le garant de la progression vers des objectifs de performance. Le coach - Permet à la personne de prendre de la distance par rapport à son vécu (passé et présent), - La conduit, par un questionnement opérationnel et socratique, vers une réflexion sur ses pratiques, sur sa vision de l'exercice de son métier et sur les représentations qu’elle développe à propos de ses actions et de résultats, - L’invite à entrer, à son rythme et sur des questions concrètes, dans un schéma s’appuyant sur des pratiques stoïciennes correctement interprétées.